Toupie et chandeliers

toupie et bougie hanoukah

Ternis et oxydés, les chandeliers en argent de mes grands-parents contrastent avec la lumière qu’ils brandissent.  Mais polis à l’argile, ils amplifient la lumière par leur éclat et deviennent une référence dans la pièce, même quand ils n’arborent pas de flamme.

A la stabilité des chandeliers immobiles, je rajoute les pirouettes d’une toupie en métal parsemée de petites pierres colorées.  D’une vive impulsion elle se met à tourner.  Le mouvement en spirale invite mon regard intrigué à entrer dans une dimension à la fois floue et définie, mystérieuse.

Le dynamisme circulaire accompagne mes prières, leur donne de l’élan.  Comme au commencement, où l’Esprit planait au-dessus des eaux.  Comme la sagesse qui jouait devant Sa Présence.  Comme David qui tournoyait en dansant.  Comme les anges qui montaient et descendaient le long de l’échelle de Yaacov.

La force calme du mouvement équilibre la toupie sur sa pointe.  Comme elle, je garde l’équilibre par le mouvement, tendant vers le haut. Non pas un mouvement affolé, frénétique, désordonné, mais un mouvement constant, léger, posé.  Une célérité paisible.  Une vitesse de croisière, où je me déconnecte de l’aspect technique et me centre facilement, en virevoltant, sur l’Essentiel.

Le Royaume à l’intérieur de moi bouillonne, tournoie, danse, sans sof, sans fin. 

Sevivon ou les 130 de Sinaï, tous les deux invitent à monter par la voix, Qol, vers l’inconnu qui nous émerveille et nous attire par sa dimension inaccessible.

Je médite sur le saviv du sevivon, le tournoiement de la toupie.  Sur le soutien du samekh, lettre circulaire.  Les 60 secondes, ou minutes, l’espace-temps qui semble s’éloigner de ce mouvement vivant de tours complets, invisibles à l’œil nu, ces pépites colorées qui s’étendent en cercles, multipliant leur couleur en parallèle avec le chandelier brillant qui amplifie la lumière. 

Plus de lumière, plus de couleur.  Comme nos êtres en prière.

La toupie finit par ralentir et s’arrêter.  Et, comme la petite fille aux allumettes, je me surprend à la faire tourner, encore et encore, pour prolonger ce moment particulier, élever mes prières et faire durer la lumière.

Chochana