Traduit de James Scott Trimm

Trois fois, la Torah nous ordonne : « Tu ne feras point cuire un chevreau dans le lait de sa mère. » (Exode 23:19, Exode 34:26 et Deutéronome 14:21).
Dans le Midrash Mekhilta (2ème ou 3ème siècle) nous lisons :
Siméon b. Yohai dit : « Pourquoi cette question est-elle répétée trois fois ? »
« L’une sert à interdire d’en manger, l’autre à en tirer profit, et la troisième à le cuire en toutes circonstances «
(Mekhilta LXXX:II:6)
Il semble que la cuisson d’un chevreau dans du lait était un rite sacrificiel païen dans les temps anciens. D’après l’archéologie d’un endroit appelé Ras-Shamra, il apparaît que faire cuire un chevreau dans le lait de sa mère était un rituel païen cananéen. Un texte ougaritique dit :
« Sur le feu, sept fois, les sacrificateurs cuisent un chevreau dans du lait… »
(Driver, G.R., Canaanite Myths and Legends. Edinburgh : T.& T. Clark, 1956. p.121).
Siméon b. Yohai était actif après la destruction du Temple et après la séparation des nazaréens du judaïsme rabbinique. Son interprétation est très faible, basée uniquement sur le fait que l’interdiction apparaît trois fois dans la Torah, et c’est de là qu’il tire cette halakha. Il n’a pas appris cette interprétation de son maître Rabbi Akiva, car Akiva donne une raison totalement différente pour laquelle l’interdiction fut donnée trois fois :
Rabbi Akiva dit : « Pour quelle raison cette question est-elle répétée trois fois ? »
« L’un englobe, en particulier, une bête domestique, le second une bête sauvage, le troisième une volaille. »
(Mekhilta LXXX:II:8)
De plus, il n’existe aucune trace d’un débat sur cette question entre Hillel et Shammaï eux-mêmes, et aucune mention du décret dans les manuscrits de la mer Morte.
Cependant, le commentateur du premier siècle, Philon, écrit :
(142) Et notre législateur […] ordonne que l’on ne prenne pas un animal de sa mère, que ce soit un agneau, ou un chevreau, ou toute autre créature appartenant aux troupeaux ou aux bêtes, avant qu’il ne soit sevré. Et après avoir également donné l’ordre de ne pas sacrifier la mère et la progéniture le même jour, il va plus loin, […] ajoutant aussi ceci : « Tu ne feras pas cuire un agneau dans le lait de sa mère. »{22}{exode 23:19.} (143) Car il considérait comme une chose très abominable que la nourriture du vivant soit l’assaisonnement et la sauce de l’animal mort, et alors que la nature providentielle avait, pour ainsi dire, répandu du lait pour soutenir la créature vivante, qu’elle avait ordonné de faire passer par les seins de la mère, comme par un canal régulier, que la licence débridée des hommes atteigne un tel degré qu’ils tuent à la fois l’auteur de l’existence de l’autre, et s’en servent pour consommer le corps de l’autre. (144) Et si quelqu’un veut habiller la chair de lait, qu’il le fasse sans encourir le double reproche d’inhumanité et d’impiété. Il y a d’innombrables troupeaux de bétail dans toutes les directions, et il y en a tous les jours qui sont traits par les vachers, ou les chevriers, ou les bergers, car, en effet, le lait est la plus grande source de profit pour tous les éleveurs de bétail, étant en partie utilisé à l’état liquide et en partie laissé à coaguler et à se solidifier, de manière à faire du fromage. Ainsi, comme il y a la plus grande abondance d’agneaux, de chevreaux et de toutes les autres sortes d’animaux, l’homme qui fait bouillir la chair de l’un d’entre eux dans le lait de sa propre mère fait preuve d’une terrible perversité de disposition, et se montre totalement dépourvu de ce sentiment qui, de tous les autres, est le plus indispensable à une âme rationnelle et lui est le plus proche, à savoir la compassion.
(Philon, Sur les vertus)
Nous savons maintenant que Philon s’est rendu à Jérusalem à un moment de sa vie et qu’il a fait des offrandes au Temple. S’il existait une coutume alimentaire générale, même seulement à Jérusalem, consistant à séparer toute viande de tout lait, Philon aurait dû en être informé. Pourtant, Philon ignore clairement qu’une telle coutume ou interprétation existait à son époque, ce qui nous amène à conclure que le décret interdisant de manger de la viande avec du lait est un ‘hiddoush (innovation) rabbinique tardif et ne fait pas autorité pour le judaïsme nazaréen. La halakha du premier siècle semble avoir seulement interdit de manger la viande d’un animal avec un produit laitier provenant de sa mère biologique, et non des produits laitiers en général.
Nous remercions James Trimm pour son œuvre de restauration nazaréenne, et vous invitons à visiter son site anglophone www.nazarenespace.com et à le soutenir dans son œuvre.